Le cancer du poumon est le cancer le plus mortel dans le monde, avec 1,8 million de décès en 2020, représentant 18 % des décès liés au cancer. Le type de cancer du poumon le plus courant, appelé carcinome bronchique non à petites cellules (CBNPC), présente souvent des mutations dans le gène EGFR, qui peuvent être traitées avec des inhibiteurs de tyrosine kinase (ITK). Malheureusement, on observe une résistance systématique à ces TKI après 9 à 12 mois de traitement. Plusieurs mécanismes peuvent être à l’origine de cette résistance dans les cancers, dont la transition épithélio-mésenchymateuse (TEM). Lors de la TEM, les cellules acquièrent de nouvelles caractéristiques qui favorisent la résistance aux traitements dans le contexte des cancers. De fait, les signaux et effecteurs orchestrant la TEM dans les CBNPC sont encore mal connus. De récents travaux du laboratoire ont mis en évidence que l’expression du gène PRNP (codant pour la protéine prion cellulaire PrPC) était associée à celle de marqueurs de la TEM dans le sous-type mésenchymateux de cancers du côlon. La PrPC, dont la forme pathologique PrPscrapie est connue pour son implication dans des maladies neurodégénératives, a d’ailleurs émergé ces dernières années comme jouant un rôle dans la survenue de la TEM dans plusieurs types cellulaires. Malgré ces avancées, les interactions entre PrPC, TEM et résistance aux ITK restent mal comprises dans les cancers du poumon, raison pour laquelle l’équipe de recherche a entrepris ces travaux.
En travaillant sur plusieurs bases de données de patients et cellules publiques, sur des lignées cellulaires, et sur des échantillons de plasma de patients atteints de CBNPC EGFR muté, les auteurs ont pu mettre en évidence plusieurs résultats intéressants :
- L’expression de la PrPC corrèle avec la TEM dans les CBNPC
- La PrPC contrôle la TEM dans les lignées cellulaires
- Des interactions réciproques et fonctionnelles existent entre la PrPC et EGFR dans les CBNPC
- Le fait de bloquer l’expression de la PrPC dans les lignées cellulaires de CBNPC augmente leur sensibilité aux ITK
- Les patients atteints de CBNPC EGFR muté expriment plus la PrPC par rapport aux autres patients non porteurs d’altération d’EGFR
Cette étude suggère un rôle potentiel de la PrPC dans la résistance aux ITK des CBNPC EGFR muté, qui doit être validé à plus grande échelle. L’équipe a établi la preuve de concept du ciblage thérapeutique de la PrPC in vivo. Dans ce contexte, il sera intéressant de vérifier si son inhibition restaure la sensibilité aux ITK. Enfin, la PrPC plasmatique pourrait être un marqueur de progression chez les patients atteints de CBNPC EGFR muté ; cette possibilité devra être évaluée plus largement.