A l’occasion de la semaine nationale de lutte contre le cancer, nous vous proposons de revenir sur les principales réalisations du CARPEM depuis 2018. Dans cet article, nous allons nous intéresser aux publications majeures réalisées dans le domaine du cancer du poumon.
Le cancer du poumon est un des cancers les plus fréquents en France. Ce cancer est la 1ère cause de mortalité par cancer en France et dans le monde. En 2018, on estime à plus de 46 000 le nombre de nouveaux cas et plus de 33 000 le nombre de décès. Le principal facteur de risque est la consommation de tabac, responsable de 8 personnes atteintes d’un cancer du poumon sur 10.
Une partie des travaux menés par les équipes du CARPEM sur le cancer du poumon visent à comprendre le dialogue entre les cellules immunitaires et les cellules tumorale dans le développement tumoral et à définir des biomarqueurs composites pour prédire le pronostique et la réponse au traitement.
a) Dialogue entre les cellules tumorales et le microenvironnement immunitaire
Le rôle clé de l’expression du récepteur TLR7 dans le dialogue entre les cellules tumorales et les cellules immunitaires a été démontré dans un modèle murin d’adénocarcinome pulmonaire. En effet, l’expression de TLR7 par les cellules malignes conduit au recrutement des cellules suppressives dérivées de myéloïdes (MDSC), ce qui conduit par conséquent à une accélération de la croissance tumorale et des métastases Dajon M, et al. Oncoimmunology 2018. Il a par ailleurs été montré l’existence d’une surveillance immunitaire dans les lésions pré-cancéreuses, avec à la fois une activation et une suppression de la réponse immunitaire. Il est intéressant de noter qu’il existe un mécanisme d’échappement tumoral qui bloque le système immunitaire et qui se produit principalement dans les lésions prénéoplasiques de haut grade Mascaux et al. Nature 2019.
b) Identification de biomarqueurs
Une corrélation a été trouvée entre le profil mutationnel du cancer du poumon non à petites cellules et l’infiltration immunitaire au sein du microenvironnement tumoral. Les combinaisons distinctes de mutations de STK11, EGFR et TP53 sont des déterminants majeurs du profil immunitaire de la tumeur (TIP). La présence de mutations de TP53 sans altérations concomitantes de STK11 ou d’EGFR (TP53-mut/STK11-EGFR-WT), indépendamment des mutations de KRAS, a permis d’identifier le groupe de tumeurs présentant la densité de cellules T CD8 et l’expression de PD-L1 les plus élevées. Dans ce sous-type de tumeur, les voies liées au chimiotactisme des cellules T, à la cytotoxicité des cellules immunitaires et au traitement des antigènes étaient uprégulées. Enfin, une survie sans progression prolongée a été observée chez les patients traités par anti-PD-1 et hébergeant des tumeurs TP53-mut/STK11-EGFR-WT Biton et al. Clin Cancer Res 2018. Pour aller au-delà du biomarqueur de cellules CD8+T intra-tumorales, le même groupe a récemment montré que les densités de cellules T doublement positives CD8+/Foxp3+ étaient le meilleur prédicteur de la survie des patients NSCLC de stade III N2 en analyse multivariée et pouvaient représenter un biomarqueur d’efficacité de la radiothérapie Boulle et al. Eur J Cancer 2020.
La mort cellulaire immunogénique pour stimuler la réponse immunitaire anti-tumorale apparaît comme un mécanisme d’intérêt dans le traitement du cancer du poumon. Le crizotinib à haute dose (10mM) est un inhibiteur de la tyrosine kinase qui induit la mort cellulaire immunogénique qui possède une activité antinéoplasique importante lorsqu’il est associé à des chimiothérapies. La combinaison chimiothérapie et crizotinib conduit à une augmenytation de l’expression de PD1 et de PD-L1 dans les tumeurs, associée à une sensibilité accrue des tumeurs du poumon à l’immunothérapie par des anticorps anti-PD1 Liu P et al., Nat Commun 2019
La mesure de la dépense énergétique de repos par calorimétrie indirecte apparaît comme un outil pronostique et prédictif de la sensibilité à l’immunothérapie anti-cancéreuse chez les patients atteint d’un cancer du poumon Jouinot A et al, Clin Nutr 2020 ; Boudou-Rouquette et al, eBioMedicine 2021 ;
Des études moléculaires ont permis de montrer la pertinence clinique et la valeur pronostique de l’analyse des micro-ARN (miR) dans le cancer du poumon non à petites cellules Garinet S et al., Br J Cancer 2021.